- Ch.8 The Farm (La Ferme)
- Ch.9 The Standoff (L’Impasse)
Ce résumé relate la vie de Laura entre ses 10 et 15 ans. Ces chapitres sont principalement axés sur sa vie à la ferme familiale, sa passion pour la lecture, son rapport à la religion (protestantisme) et ses questionnements existentiels qui en découlent.
Voici ce qu’il s’en suit :
Suite à la rupture entre Alice (la mère de Laura) et Ed ; Laura, Tommy et leur mère partent vivre dans la maison familiale maternelle qu’ils aiment tous appeler « The Farm » (« La Ferme », en français).
Les grands-parents maternels de Laura avaient acheté cette bâtisse lors de la « Grande Dépression » dans les années 1930. Elle était située dans un endroit quasiment désert, à quelques kilomètres de la « Route 19 » ainsi que d’un village du nom d’Aripeka, et donnait sur le Golfe du Mexique. À l’époque de la prohibition, cet axe routier était utilisé par les contrebandiers pour effectuer leurs trafics d’alcool. Un peu plus loin au nord, au milieu de nulle part, existait une station balnéaire où les célèbres Babe Ruth et Al Capone résidaient de temps à autre.
« The Farm » était une vieille maison où il n’y avait ni électricité ni eau courante, qui jouissait d’un terrain florissant d’une dizaine d’hectares, d’une grande variété d’arbres, d’une source d’eau et d’un potager dans lequel poussaient des légumes en abondance. De l’autre côté de la bâtisse, se trouvait un vaste marécage parsemé de petits îlots de palmiers, de pins et de cèdres.
Pour se rendre compte de la faune sauvage qui y était présente, Laura et Tommy eurent même l’occasion de jouer avec un bébé alligator, qu’ils nommèrent Pokey. Laura dit avec humour que « The Farm » aurait été l’endroit parfait pour qu’un « Brontosaure puisse brouter » et que c’était « littéralement, le paradis ».
Voici une description que fait Laura de l’ambiance de ses soirées là-bas :
« Assise sur le perron [de la ferme,] dans le vaste étendu d’ombre d'énormes et anciens pacaniers, [j’écoutais] le bruissement des feuilles des palmiers et [les] bourdonnements des moustiques […], [j’observais] le soleil se coucher avant [qu’il atteigne] la dernière ligne de l’horizon [et] qu’il ne disparaisse au loin, [vers] la silhouette des baies… [C’]est un souvenir d’une intensité inexprimable. »
Effectivement, Laura aimait particulièrement cet endroit où elle se sentait comme « à la maison ». En 1989, ayant hérité de la bâtisse, elle la vendra à contrecœur sous les pressions de sa mère qui se battait contre les membres de sa famille pour s’approprier une grande partie de l’héritage familial.
Aujourd’hui, l’ancienne ferme est entourée d’autres maisons construites sur des canaux artificiels. Les forêts qui environnaient le domaine ont été rasées pour laisser place à un terrain de golf et au parking le plus grand du monde (le parking de la U.S Highway 19). Comme Laura le dit si bien : « Time flows ! »(1), et pour le mieux au vu des changements actuels ! [« Le temps file ! »(1), en français]
Mais sur ce grand terrain, à l’époque, il y avait également un lieu que Laura, son frère et ses cousins appelaient « The Spring » [« La Source », en français]. Un jour, ils y avaient trouvé une roche en calcaire sur laquelle y étaient gravés un nom et deux dates ; c’était une pierre tombale.
Suite à cette découverte mystérieuse, cet endroit devint le lieu principal de leurs aventures où ils se livraient à des challenges, dans lesquels chacun devait dépasser ses peurs, être courageux et défier l’énergie de ce lieu qu’ils qualifiaient dorénavant, comme étant de mauvais augure. La pierre tombale fut ensuite placée sur l’âtre de la cheminée de la vieille ferme, parmi d’autres curiosités, telles que la carapace d’une tortue et des peaux de serpents séchés, ce qui les faisait frissonner à chaque fois qu’ils passaient devant.
Mais il y avait surtout une étable, dans laquelle y étaient entassés pleins de vieux objets dont des caisses remplies de bouquins. C’est dans cet espace, à l’âge de 11 ans, que Laura fut fortement attirée pour la première fois vers un livre qui parlait de politique. L’ouvrage en question s’intitulait « Mon témoignage devant le monde - Histoire d’un État Secret » (The Story of a Secret State, titre original) par Jan Karski. Pendant sa lecture, son cœur battait la chamade et il était hors de question qu’elle repose le livre !
Elle fut alors transportée en Europe, en Allemagne mais tout particulièrement, en Pologne ! N’est-il pas drôle comme il n’y a aucun hasard, puisque Laura dit elle-même : « Au moment où j’avais fini le livre de Karski, j’étais persuadé que la seule personne que je pourrais épouser serait un polonais. ».
Elle explique aussi qu’elle fut admirative du cran et de l’héroïsme des résistants polonais, qui lui rappelèrent les valeurs du courage, de l’intelligence et de la créativité ; des valeurs qu’elle admire, qui l’inspirèrent profondément, et qui pour elle, représentent des empreintes importantes de ses propres « idéaux de conscience », auxquels elle aspirait depuis son enfance.
Lors de l’assassinat de J.F. Kennedy, Laura avait une dizaine d’années. Elle se rappelle qu’avant cet évènement, elle n’avait jamais saisi l’ampleur du mal comme étant en réalité un « mastodonte global », affectant toute la Société. Plus jeune, elle pensait que le mal ne pouvait qu’être, ou avoir attrait, à quelque chose de personnel. La phrase de Kennedy : « Car nous sommes confrontés dans le monde entier, à une conspiration monolithique et impitoyable… » prit alors pour elle, tout son sens.
Par la suite, les cauchemars de Laura reprirent de plus belle. Elle percevait d’innombrables corps décédés dans des paysages cratérisés, des avions volant dans des ciels rouges fumants, des soldats, de la terreur et des larmes. Parfois même des rivières de larmes où des serpents se tordaient et rampaient à travers les terres. Elle dit : « J’avais perdu mon équilibre intérieur[,] et à la fois[,] j’avais trouvé la première base solide de ma vie [dans la lecture]. ». À ce jour, Laura a lu approximativement 10,000 volumes et se souvient de quasiment tous les titres et auteurs. Cette capacité qu’elle considère comme étant inespérée, lui a permis de faire de nombreux liens et connexions dans ses recherches.
Enfin, Laura relate que rien ne l’intéressait plus que de tenter de comprendre comment un évènement aussi terrible que l’Holocauste arriva sur Terre, « s’il y avait un [soi-disant] Dieu au paradis ». Elle se disait qu’en parvenant à comprendre les raisons de la Shoah, elle pourrait alors saisir tout le mal qui frappait la planète. Et comme le dogme le plus sacré de son enfance stipulait que la Bible représentait la parole ultime – celle de Dieu, elle se mit à décortiquer la Bible sous toutes ses coutures (archéologie, us et coutumes, histoire des peuples judéo-chrétiens, etc.), reprenant la version standard de King James(2). (La Bible du Roi Jacques(2) publiée en 1611 et qui devint la version standard de l’Église d’Angleterre.)
Relevant de nombreuses contradictions, elle alla chercher des réponses auprès de la communauté théologique locale qui lui dit de manière catégorique : « La Bible n’est pas contradictoire. Vous ne la comprenez tout simplement pas correctement. ». Les membres de sa famille, qui pour la plupart, étaient protestants-pratiquants avaient pour dicton : « Dieu l’a dit, j’y crois, et c’est comme ça ! ». Les professeurs de son école tentaient également de lui expliquer que « l’homme avait été prévenu ». Mais Laura n’était pas d’accord ; l’homme avait peut-être été prévenu, mais pas contre la ruse et la tromperie !
De plus, Laura avait une tante qui était reniée et considérée par sa famille comme une âme démoniaque, parce qu’elle était catholique. Au même titre, elle avait une amie, Hetty, avec qui il lui avait été interdit de jouer, elle aussi du fait de sa croyance en la religion catholique.
Ainsi, observant la dichotomie et la superficialité des comportements familiaux qui ne représentaient absolument pas les idées que Laura se faisait des « vrais » enseignements christiques ; assoiffée par une compréhension plus profonde des choses, voici donc quelques-unes de ses réflexions au sujet du mal et de la religion :
« Oui, j’avais appris que l’homme avait pêché en Eden car Eve avait été tentée et avait transmis sa tentation à Adam. Mais cette simple histoire ne répondait pas à la raison d’un aussi grand mal tel que l’Holocauste. Je [me] devais de comprendre la problématique du [« mal »] et sa relation avec Dieu et l’humain. […] Après tout, la doctrine [judéo-chrétienne était principalement basée sur] la foi. Mais rien n’était satisfaisant. Toutes les prétendues réponses, lorsqu’elles étaient profondément explorées, ne répondaient pas à une essence profonde que je ne savais exprimer véritablement. […]
[T]out d’abord, on nous apprend que Dieu est Tout Puissant, Omniscient, Parfait et Aimant. Deuxièmement, on nous dit que l’homme a été créé « à l’image et à la ressemblance de Dieu ». Mais la tentation arrive sous la forme d’un ange « déchu » qui, nous devons supposer, fut aussi créé par ce même « Dieu Omniscient, Aimant [et] Parfait ». « L’homme parfait », créé à l’image de Dieu, succombe aux épreuves de la tentation offertes par son camarade [« la création »] et « chute ». Ensuite, toute l’humanité souffre des répercussions de cet évènement pour l’éternité. […]
Je réalisais qu’il y avait quelque chose de sérieusement erroné dans ce concept. J’ai [alors] essayé de le décortiquer pour voir si je trouvais une manière d’excuser Dieu. Mais plus j’y pensais, et plus le problème devenait grave. Si l’homme est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, il doit, de toute nécessité, posséder les attributs de Dieu. […] [Et comme l’histoire raconte que l’homme s’est laissé tenter,] nous devons [ainsi] supposer que Dieu est [donc] lui aussi sujet à la tentation. […]
[Et puis après tout, si Dieu était vraiment aimant, pourquoi la notion du péché et de la culpabilité qui en découle, existerait ?] [U]n parent aimant n’infligerait certainement pas une punition disproportionnée [à son enfant] pour une infraction commise. […] De plus, si Dieu est Tout-Puissant et Parfait, comment est-ce que l’une de Ses créations pouvait posséder des attributs liés au mal […], qu’elle soit ange ou humaine, […] [sachant que cela impliquerait donc] que le créateur Lui-Même posséderait ces attributs ? [!] […] C’était une pensée terrifiante. Un Dieu Tout-Puissant avec des caprices humains ou des penchants diaboliques [sur le vivant.] […]
[L’humain] était supposément un homme parfait, installé dans sa création parfaite, mais il n’était pas vraiment parfait car le mal avait le droit d’y exister. Et ce point me prenait vraiment aux tripes [!] Nous ne sommes jamais [réellement] informés à propos du pourquoi de ce mal qui est arrivé [ici-bas !] […]
Pourquoi est-ce que tout le monde était aussi évasif lorsque je commençais à poser mes questions [et à remettre le système en cause] ? […] D’après la doctrine [judéo-chrétienne], le fait que quelqu’un s’interroge sur la Bible témoigne d’une influence satanique – un esprit qui remettait Dieu en question était maudit – et le doute représentait la vaste route vers l’enfer. J’implorais Dieu de me montrer la réponse à ce problème, mais tout n’était que silence. J’étais seule avec ma question. Et cela brûlait comme un volcan en éruption.
Je portais un énorme fardeau. Le conflit entre ma réflexion et ma foi mena à de très sérieuses difficultés cognitives et émotionnelles. »
Par conséquent, Laura se mit à lire tout ce qu’elle trouvait sous la main ce qui, elle l’espérait, lui procurerait peut-être la solution au « Grand Mystère ».
Elle commença ses lectures en se plongeant principalement dans des livres historiques. Mais elle se rendit rapidement compte qu’il était très difficile de décortiquer un seul évènement, sans qu’il y ait une répercussion et une opacité découverte sur une multitude d’autres actions au cours de l’Histoire. Elle dit : « Avec la naïveté d’un enfant, je pensais que je pouvais simplement m’y plonger et réinventer la roue, en résolvant des problèmes auxquels des philosophes et des théologiens se sont consacrés depuis des millénaires. Quelle hubris ! »
Après avoir lu la plupart des livres disponibles dans son école et aspirant à en savoir bien plus au sujet de ce qui l’entourait, lorsqu’elle se rendait à Tempa le week-end pour voir ses grands-parents, elle allait à la bibliothèque de la ville et empruntait une quinzaine de volumes. Puis elle les rendait deux semaines plus tard pour en réemprunter une autre série. Enfin, Laura relate qu’elle n’a que très peu de souvenirs de ses années de collège et de lycée, car elle était constamment absorbée, (dans le bus, à table, etc.) par ses lectures ou la musique.
Pour en revenir à la vie à la ferme familiale, Alice, qui avait pour habitude de sortir et de faire la fête s’ennuyait grandement là-bas. Du fait de son absence psychique et émotionnelle, la mère de Laura devint quasiment une inconnue, et leur relation se détériora de plus en plus.
Alice, qui voulait substituer tout l’héritage familial, usa ensuite de ses manipulations habituelles pour monter Laura et Tommy contre leur père et le reste de la famille, qu’elle considérait comme des ennemis. De plus, Alice disait souvent à Tommy, par manipulation, et dans l’espoir d’obtenir son soutien : « Il y a quelque chose qui ne va pas avec ta sœur… ». Elle se mit également à battre Laura à coups d’élingue de rasoir. Bien plus tard, Alice tentera même de salir le nom de sa propre fille pour arriver à ses fins obsessionnelles.
Pour illustrer une fois de plus la force de caractère de Laura et sa capacité à dire « NON », vers ses quinze ans, alors que sa mère voulait lui asséner un coup de sangle, Laura la lui arracha des mains et lui dit fermement que si jamais elle retentait de lui faire du mal, ne serait-ce qu’une seule fois, ce serait elle, cette fois-ci, qui la fouetterait.
Voici ce que Laura exprime de sa relation avec sa mère :
« [Dans son rôle de mère, Alice] était matérialiste et contrôlante. Les émotions devaient être supprimées, réprimées, ou complètement mises de côté. Les émotions étaient une faiblesse. […] Pour [ma mère], quiconque ne se soumettait pas à ses manipulations devenait une menace, non seulement envers elle, mais aussi envers mon frère et moi. […]
[Mon frère, quant à lui,] était d’accord avec tout ce que [ma mère] disait, s’exécutait selon ses exigences, puis faisait comme bon lui semblait derrière son dos. Je n’arrivais pas à faire ça. J’avais un grand besoin d’être pleinement moi-même [, d’être honnête], d’éliminer les secrets. […] Je ne pouvais pas faire exactement ce que [ma mère] me demandait dans de nombreux cas car cela contredisait [profondément] ma perception de ce qui était juste. […]
[Avec le temps, j’ai compris que ma mère] ne faisait qu’effectuer toutes les choses dont elle accusait les autres de commettre, afin de justifier ses propres actes négatifs contre notre famille en déshumanisant et en injuriant ces derniers. […] À mon grand regret, je l’ai soutenue pendant des années dans ses campagnes contre ses ennemies qui n’existaient en réalité que dans sa propre psyché. […]
[Enfin, dans mon enfance,] au plus j’étais contrariée, au plus [ma mère] devenait froide et calme dans ses actions de réduire [mon] esprit en miettes. […] J’étais persuadée qu’elle me détestait. […] Je faisais encore attention aux fenêtres. Mis à part pour les cauchemars de guerre, la solitude dévorante, et le conflit avec ma mère, aucune autre chose étrange arriva et on me laissa en paix avec mes livres. »
Malgré tout, Laura relate qu’elle garde en mémoire les bons côtés de sa mère, tels que son talent de lire et de réciter des poèmes, de chanter, son élégance et sa capacité à cuisiner comme un vrai cordon-bleu. Au fil du temps, elle a accepté que sa mère ait été comme elle l’a été dans son enfance, avec ses qualités, tout comme ses défauts. Avec le recul, elle s’est aussi rendu compte qu’elle avait toujours voulu croire en la vérité qu’exprimait sa mère. Auparavant, elle voulait essayer de concilier les divisions qui existaient au sein de sa famille.
« Belle idée, pas vraie ? Est-ce que cela a marché ? Non. » dit-elle. Laura explique que toutes ces expériences lui permirent cependant, d’affirmer et d’assumer sa marginalité.
Pour finir, voici un extrait qui ouvre au travail auquel Laura se consacrera plus tard :
« Plus je lisais, et plus la problématique du mal semblait grandir de plus belle. Il était assez évident que l’homme était coupé de Dieu. Et pourtant [,] l’environnement dans lequel nous vivions [, « The Farm »,] représentait tant de beauté qu’il était difficile de ne pas voir la [manifestation] de Dieu partout. […]
Et si quelqu’un, quelque chose, regardait tout le monde, en train d’attendre, sachant qu’à un moment précis, toutes les lumières s’éteindraient ? Je me libérais du miroir glacial de toutes ces pensées et focalisais mes yeux et mon esprit sur cette incroyable étendue sombre de néant dotée de milliards de monde pour lesquels aucune explication n’existait. Que pouvait-il possiblement y avoir en dehors de l’espace dans lequel nous existons ? […]
[Et à] cause de cette interrogation sur le mal, [j’avais une grande difficulté à vivre « le plaisir de la vie »], excepté en tant qu’observatrice. [Comment pouvais-je y entrer] si je ne comprenais pas [la vie ?!] […] Je devais savoir au plus profond de mes cellules que [j’avais un rôle à jouer, à un niveau intime, dans ma propre existence !] »
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